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Actualités d'hier et d'aujourd'hui sur les Pyrénées Centrales, au travers de l'histoire d'une famille, celle d'un "pays", celui des Pyrénées. Le passé est omniprésent avec celui d'un petit peuple : la Barousse...

1 : 42-44,occupation et libération du Comminges-Barousse

Galié

Galié

 

Pour ceux qui ont bien voulu assister à l'après-midi conférence et spectacle organisé par l'association Luchon d'Antan dont le président dynamique et passionné est Christian de Miégeville le 4 mai 2019 : voici le texte initial de mon intervention que bien entendu je n'ai pas suivi car pour moi, l'histoire se raconte, ne se lit pas comme un texte classique.... Le texte planifié sert de support....

 

 

 

Je vais vous raconter l'année 1944 dans cette partie des Pyrénées et surtout comment les allemands et la Gestapo ont agi dans nos vallées, à partir des archives militaires déclassifiées mais surtout à partir des témoignages des anciens résistants baroussais.

 

 

 

J'ai eu la chance de rencontrer les derniers maquisards de Barousse dans la décennie 1990 qui m'ont raconté « leur » guerre entre Izaourt et Cierp-Gaud et les derniers événements qui ont vu la fuite du chef de la Grenzpolizei Karl Dethlefs surnommé Cou de Cigogne, en Espagne, l'affaire du Pont de Muna, l’accrochage de Rouziet, l'acte fou des "derniers moments" à Bertren lors du départ des Allemands en une très longue colonne avant le 20 août date de la libération de toute la région.

 

 

 

Avant de commencer je vous cite une phrase de Georges Haffner, commerçant brassier luchonnais dont la famille a joué un grand rôle dans la Résistance de la ville. Il l'a écrite dans un document que m'ont remis son fils et Mr de Miègeville.

 

 

 

La voilà : « la résistance locale évita les actions violentes, ceci pour ne pas obérer la sécurité des passages clandestins, que l'envoi d'effectifs importants allemands consécutifs aux actes belliqueux, n'auraient pas manqué de rendre beaucoup plus aléatoires ».

 

 

 

D'emblée, il met les choses à leur place : il n'y a jamais eu d'affrontements violents qui seraient venus de la Résistance parce que c'était tout simplement impossible. Les Allemands le savaient car ils se trouvaient dans la même situation que leurs adversaires même avec des effectifs très importants, ils ne pouvaient pas gagner.

 

 

 

Pourquoi donc ? Tout simplement à cause du relief des Pyrénées. Ce que m'ont fait remarquer d'emblée les anciens résistants de Barousse qui, comme tous, entre novembre 42 et août 44 rêvaient d'en découdre avec les « envahisseurs ».

 

 

 

Par contre, les combats, les attaques, les massacres ont pu se faire dans les régions de collines et de plaines car les Allemands fortement armés pouvaient avoir le dessus d'une résistance peu ou mal armée. Mais qui savait se défendre toutefois.

 

 

Dans les vallées de montagnes, les Allemands savaient bien que s'ils tentaient quelques massacres par exemple au lance-flammes, la montagne, les prés et les bois en plein été sec et chaud, allaient brûler mais eux-mêmes n'en sortiraient pas vivants. Par contre, dans les plaines....

 

 

Une telle attitude ne porte qu'un seul  nom : lâcheté.... et ajoutons-y petitesse mais c'est la méthode nazie, la machine à fabriquer la haine et la mort....

 

 

Toutefois trouvons-y un point positif : tant de gens ont pu être sauvés grâce au courage des passeurs, des ravitailleurs, des "cacheurs" et des faussaires.....

1 : 42-44,occupation et libération du Comminges-Barousse

Le territoire sous la coupe de la Grenzpolizei de Luchon de novembre 1942 à août 1944.

Les vallées pyrénéennes en 1944

 

 

Les Pyrénées forment une barrière qui s'apercevait de loin lorsqu'il n'y avait pas de pollution. Entre la plaine toulousaine et l'entrée de la barrière montagneuse, les régions de coteaux se succèdent et à partir de Saint-Gaudens, la plaine de Rivière se heurte au niveau de la montagne de Burs à Barbazan au massif pyrénéen fait de vallées perpendiculaires à la chaîne et parallèles entre elles séparées par des goulets étroits entre fleuve et montagne.

 

 

Mais auparavant, si vous vous demandez pourquoi je commence mon intervention avec le relief de notre région, c'est parce qu'il a été primordial durant la période 1942-1944.

 

 

Pourquoi ? Et bien parce que pour y circuler et y vivre dans des conditions même très rudes, il fallait être né dans un de ces villages. Ils sont tous nichés contre la montagne assez loin des rivières et du fleuve.

 

 

Et puis chaque massif est pentu, avec des coumes et des chaos nombreux et elles sont si profondes, si renfermées, si impénétrables qu'il est plus facile de s'y perdre si on n'a pas une carte et une boussole – je parle de cette époque pas d'aujourd'hui. Il y a les pistes....

 

 

De ce fait, il ne fallait pas aux Allemands un très grand nombre d'hommes, cela n'aurait servi à rien, ils se seraient fait massacrer s'ils s'y étaient aventurés. Ils ont préféré jouer avec les défauts des hommes : la collaboration et la délation. Disons en deux mots : dénonciation et enrichissement.

 

 

En voici une preuve avec cette photo prise depuis un paramoteur.

 

1 : 42-44,occupation et libération du Comminges-Barousse

 

 

On remarque un alignement de plaines coupé par les méandres de la Garonne et l''étroitesse des entrées :

 

  • au pont de Luscan et à Luscan même

  • au pont de Galié et au passage de Bagiry

  • puis après le vallon de Siradan/Frontignes/Marignac/Cierp-Gaud, on remarque que la vallée de la Pique à droite et la vallée de la

  • Garonne/frontière sont étroites, comme enfermées par les montagnes, côté droit le Hourmigué recouvert de forêts, côté gauche le massif plutôt pierreux de Saint Béat qui forme une barrière rocheuse à forte pente.

 

 

De plus, comme la population agricole était nombreuse, il y avait beaucoup de petites exploitations, les pentes étaient cultivées jusqu'à la limite rocheuse d'où commençaient les plantations de hêtres. Bien sûr sur les pentes, les haies et les bosquets d'arbres de lumière assuraient le bois, le repos des animaux domestiques et sauvages et leur pérennisation.

 

 

 

De ce fait, les Résistants qui surveillaient les Allemands et les Allemands qui essayaient de surveiller les Résistants, étaient de force égale. Ce qui les différenciait c’était :

 

 

1 – l'armement important des troupes d'occupation

 

 

2 – la connaissance parfaite des forêts, des estives et des crêtes des sentiers et des villages pour les maquis. Et surtout la complicité de la plus grande partie de la population. La collaboration existait bien sûr mais elle n'a été le fait que de personnes qui n'avaient qu'un seul but : s'enrichir.  Bien sûr, il y avait également comme partout des groupes assez importants qui partageaient les idées des occupants car pétainistes jusqu'à la racine des cheveux.

 

 

 

Il ne faut pas oublier que les maquisards ne combattaient qu'avec les armes qu'ils avaient pu voler ou garder puisque au moment de l'armistice de juin 1940, les habitants avaient dû remettre leurs fusils aux autorités, dans les mairies. Les allemands sont arrivés le 11 novembre 1942 mais l'hiver était proche. De rares largages d'armes par les Alliés ont commencé en 43 à partir de l'été. 

 

 

 

Ils n'ont pas été faciles car vu le relief trop cultivé, les trous d'air et les courants contraires, les colis sont bien souvent tombés au fond des ravins et les résistants ont récupéré toujours ce qu'ils ont pu.

 

 

Au début, certains habitants (!) avaient eu l'audace de les voler car ils ne tombaient toujours pas au bon endroit. Il était difficile de marquer par des feux les aires de largage vu que les rondes allemandes étaient nombreuses et les feux étaient visibles de loin.

 

 

A partir de janvier 1944, ils devinrent réguliers et nombreux ce qui galvanisa le moral des maquisards ! Mais nous nous devons de préciser qu'en août 1943, trois croix construites par les habitants sous la houlette de moines blancs belges,  se dressaient telles des sentinelles ...

 

 

 

Je ne connais rien aux affaires militaires mais quelque chose me tracasse depuis longtemps : ces 3 croix de  Barousse Mombourg à Bertren, Herbe Rouge en haut du Gert et Pic de Cau à Gaudent. (1)

 

 

 

Si l'on observe le vol des rapaces, lors de leur surveillance des champs labourés et  des prairies fauchées, il est vrai que ces magnifiques oiseaux suivent exactement les mêmes courants d'air sur toute cette portion de territoire qui est assez vaste et peu peuplée.

 

 

Elle l'était déjà, un peu moins peuplée que le reste de la vallée durant la guerre, car les villages sont ramassés sur eux-mêmes et bien encastrés dans les massifs. Autour d'eux à moyenne altitude, dans les clairières des bois, il y a assez d'espace invisible depuis les routes pour recevoir les colis largués par des avions en pleine nuit.

 

 

Je me permets donc de penser que ces trois croix dont celle du Mombourg à Bertren plus visible que les autres depuis la plaine, marque le territoire parfait pour larguer les armes, les colis contenant du corned-beef (une horreur paraît-il pour ceux qui y ont goûté durant la guerre, qui a été mangé bien sûr quand il n'y n'avait pas autre chose mais surtout donné aux chiens et aux cochons tellement, pour ces gourmets baroussais, c'était mauvais.... par contre si ça avait été de la charcuterie....) et des cigarettes que les résisitants partageaient avec les hommes des villages : des cigarettes coupées en eux, c'était mieux que rien....

 

 

Si l'on observe bien le paysage de l'époque, le triangle formé est cultivé et en estives. La route de l'Ourse est en contrebas et le cercle de montagnes est caché.

 

 

Et les croix en ciment blanc, sont si lumineuses la nuit sous la lune et les étoiles !

1 : 42-44,occupation et libération du Comminges-Barousse

 

Les trois croix marquent le paysage idéal pour larguer les colis aux maquis locaux qui pouvaient distribuer ensuite à ceux du Hourmigué ou bien de Saint-Bertrand.

 

 

Les croix étant en béton blanc reflétaient la lumière de la lune et des étoiles et les pilotes pouvaient suivre leur alignement grâce à la longitude et à la latitude, dans ces massifs de moyenne montagne. On remarque que les parcelles cultivées montaient assez haut mais les crêtes étaient boisées avec des clairières par-ci par-là...

 

 

J'ai rencontré un groupe d'anciens résistants qui avaient 20 ans en 1944 mais qui avaient aidé les réseaux de passages clandestins vers l 'Espagne formés dès 40/41, comme coursiers. A partir de novembre 42 et la formation des maquis, ils se virent confier d'importantes missions : jeunes et habitués à la montagne, ils transmettaient les messages des montagnes du Gert de Izaourt jusqu'à Cierp-Gaud. Ces messages venaient du maquis de Nistos qui occupait aussi les montagnes de Saint-Bertrand mais ceux de Luchon donnaient aussi des ordres. D'après ce que j'ai compris, ça galopait dans les massifs.

 

 

Où se cachaient-ils ? Dans les granges foraines cachées dans des bosquets difficiles à trouver et surtout, surtout dans les grottes fort nombreuses et également impossibles à trouver. Bien entendu, il existait une intendance et nous allons en parler. 

 

 

C'était une sacrée organisation qui mettait en rage le sergent Karl Dethlefs, commandant de la Grenzpolizei de Luchon  arrivé en  mars 1943 comme subordonné puis nommé commandant de la Grenzpolizei, car il n'a jamais pu faire parler qui que ce soit sur eux.

 

 

Dethlefs avait Galié et Bertren dans son collimateur et leur a fait vivre l'enfer. Il fit régner la terreur surtout à Bertren durant les mois de juin et juillet 1944 après l'attaque de Galié le 23 mai 1944.

 

 

Cela fait donc 75 ans aujourd'hui, qu'à  Galié, une jeune femme est morte tuée par une grenade allemande alors qu'elle se dirigeait vers le lit de sa petite fille de trois ans pour s'enfuir avec elle.

 

 

Elle tomba sur le palier du premier étage mais sa mère eut le temps de sauver la fillette. La seule personne que Dethlefs put arrêter de tous les participants de la réunion fut une dame qui n'avait rien  à voir avec la Résistance et qui se trouvait là par hasard. Elle venait passer quelques temps de vacances. Malgré ses protestations et l'évidence, Dethlefs après un interrogatoire musclé, l'envoya en déportation.

 

A suivre

Jackie Mansas

23 mai 2019

NOTES

 

1 -   voir article page 21 : Patrimoine oublié de Barousse le Mombourg à Bertren

 

Ayant appris que des personnes indélicates se servent en les transformant, de mes articles à des fins personnelles, je me vois obligée de les faire protéger juridiquement.

RAPPEL :

https://www.adagp.fr/fr/droit-auteur/les-textes

LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

Deux lois ont posé les grands principes du droit d’auteur :

- la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique ;
- la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 relative aux droits d'auteur et aux droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle.

Les dispositions de ces deux lois ont été intégrées au code de la propriété intellectuelle (« codifiées ») par la loi n° 92-597 du 1er juillet 1992.

C’est aujourd’hui le code de la propriété intellectuelle, complété notamment par la loi « DADVSI »du 1er août 2006 et les lois « HADOPI » de 2009, qui constitue le texte de référence en matière de droit d’auteur.

>> Consulter le code de la propriété intellectuelle sur Légifrance.

 

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