Bramevaque en Barousse dépecé et ruiné avant sa restauration
Bramevaque en Barousse après la restauration du donjn et du mur d'enceinte
Forteresse ou tour de guet et à signaux
Ces édifices marquent une administration féodale militaire. Mais ces lieux où des hommes armés vivaient en permanence sont aussi les garants des deux autres pouvoirs : le politique et le social. Qui entraîne bien évidemment, le dévveloppement économique de la vallée où se trouvent ces forteresses.
Ne pas oublier la religion car elle régissait la vie sociale autant que les désidérata des seigneurs, elle garantissait les coutumes et protégeait les populations.
Nous allons passer le pouvoir militaire qui est aux ordres des seigneurs. Eux-mêmes aux ceux des rois.
Nous confondons souvent les territoires appartenant aux deux ordres représentant l'organisation politique de la France : la noblesse et le clergé.
Bien sur, je n'oublie pas le Tiers Etat majoritaire mais sans voix, sans pouvoir, sans représentation de classe. Il est le seul mais étant le seul à s'acquitter de tous les impôts au profit du roi, d'accord, mais aussi de celui des deux ordres privilégiés.
Nous allons visiter, suivez le guide, ces différences de territoires entre les évêchés (ordre du clergé) et les comtés (ordre de la noblesse) issus des marches militaires voulues par Charlemagne.
Evêché du Comminges, Saint-Bertrand de Comminges :
"Situé au centre de la chaîne des Pyrénées, le diocèse de Comminges s’étendait entre le comté de Bigorre à l’ouest et les comté de Foix et vicomté de Couserans à l’est.
L’un des plus anciens de France comme existant au IVe siècle, il fut définitivement supprimé en 1801. Son territoire fut alors démembré entre les départements de la Haute-Garonne et des Hautes Pyrénées, la partie Val d’Aran fut affectée à l’évêché espagnol d’Urgel". Revue de Comminges Abbé Dumail.
" Le diocèse confinait :
- au septentrion (nord), avec les diocèses d'Auch et de Lombez ;
- au levant (est), avec ceux de Rieux et de Couserans ;
- au midi (sud), avec ceux de Huesca et Barbastro, en Aragon, et d'Urgell, en Catalogne ;
- et au couchant (ouest), avec celui de Tarbes.
Onze paroisses relevaient de la généralité de Toulouse et de l'intendance de Languedoc. Les autres de la Généralité d'Auch. " (Abbé Dumail)
Diocèse = territoire religieux couvrant, par exemple comme chez nous, deux comtés et gouverné par un archevêque
Comtés : marches militaires à fonction élective, créées par Charlemagne aux frontières de son empire où se trouvaient une ligne de forts romains.
Il les fit restaurer en y ajoutant une nouvelle architecture qui s'appuyait sur des positions défensives "modernes", la guerre ayant changé de visage entre la fin de l'empire romain et l'immense cruauté voire la sauvagerie du Haut-Moyen-Age.
453, chute de l'empire romain, l'an mil, renaissance des différents royaumes issus du démembrement de l' empire carolingien au profit de ses successeurs.
L'an mil voit surtout un renouveau de l'église avec la fondation de l'abbaye de Cluny, chef de file du renouveau chrétien. Ils mettent en place un nouveau système économique qui va donner tout son éclat à la chrétienté.
Celle-ci sera parsemée d'épisodes sanglants comme les croisades, l'inquisition, les guerres entre seigneurs féodaux, mais le renouveau économique va bénéficier à l'Eglise et à quelques puissantes familles d'origine gallo-romaine ayant gardé le pouvoir malgré tout..
Le peuple en profitera et comme il faut des bras pour travailler sur ces domaines, la population mieux traitée et surtout mieux nourrie va se développer mais subira le poids du servage.
Celui-ci disparaîtra au fil des siècles sur les domaines seigneuriaux sauf sur le domaine royal. Louis XVI ne l'abolira qu'à la veille de la Révolution mais dans les faits, ses serfs étaient plutôt libres, ils n'en avaient que l'appellation.
La féodalité succède à la vassalité mais en garde l'organisation et l'administration tout en les durcissant. Les anciens forts romanos/carolingiens deviennent tout simplement des châteaux féodaux chargés de surveiller les vallées et plaines de toutes attaques et invasions.
Mais beaucoup d'entre eux ne sont pas propriétés de nobles puisque dans les Quatre-Vallées, ceux-ci, peu nombreux, sont considérés comme des citoyens "ordinaires", c'est-à-dire qu'ils sont obligés de travailler et ... payent des impôts ! Ce qui leur reste au travers de la gorge car leurs homologues partout ailleurs sont des "nobles vraiment nobles" : ils exploitent le quidam... !
Revenons donc à nos deux villages actuels nommés jusqu'à la Révolution, paroisses.
Bramevaque : un nom, un lieu isolé, une fonction honorifique, tout est propice à la naissance et à la transmission orale des légendes.
Oui, de nombreuses légendes sont nées et ont été rapportées lors des veillées et fêtes votives par les chanteurs et conteurs de la paroisse. Elles ont fait rêver des générations et entretenu, en contrepartie, des querelles.
Que veut dire Bramevaque ? vache qui brame ou "Vache, brame !"
Tout comme Brameloup qui existe en plusieurs exemplaires alors que nous, les Pyrénéens, nous n'avons que deux Bramevaque ! un loup ne brame pas, il hurle alors, il faut chercher dans la langue latine et le paysage d'alors....
On finira par trouver. Mais bon il faut qu'un luinguiste latiniste s'y atelle si cela l'intéresse !
Moi, je n'ai suivi que des études secondaires de maths/physique/chimie/sciences naturelles, alors le latin.... Zéro en chiffre !
Et puis je n'ai pas envie de savoir vraiment car comme tous les montagnards, j'ai l'imagination fertile et la curiosité de toujours faire parler le paysage. Celui d'aujourd'hui est commun mais il va changer, c'est indubitable.
Non, c'est celui du passé alors naturel et d'une beauté à couper le souffle qui est passionnant. S'il avait été hostile, jamais les humains n'y auraient traversé les siècles, cela nous l'avons en nous.
Il suffit d'observer non pas son nombril ce qui est sans intérêt, mais ce qui existe autour de nous : les arbres qui craquent comme un murmure, c'est la sève source de vie qui monte, monte, monte...
... écouter dans le silence les mille bruits de la montagne, une petite trille d'oiseau, le pas léger d'une biche qui fait caquer une branche morte, celui lourd du cerf qui trouve toujours le moyen de heurter un tronc avec ses bois giganteques...
.... et même, on peut entendre pour peu que le vent les caresse, les petites fleurs pousser.
Il faut aussi sentir les odeurs qui s'envolent avec la brise ou le vent : le tilleul au début de l'été qui ennivre, l'humus retourné par les sangliers ou les blaireaux, quelques fleurs qui surgissent et offrent leur parfum léger aux abeilles sauvages... tout parle, tout vit, tout nous apprend la vie.
Pour nos si lointains ancêtres parcourant la forêt naturelle et non pas cultivée comme de nos jours, la vie était comme un gros livre, comme une bibliothèque détentrice d'un immense savoir ....
Passons maintenant au Bramevaque du Couserans
PHOTO JEAN-PIERRE POMIES (voir son site de photos, clic mots-clés son nom et son prénom ou bien Bramevaque en Couserans photos)
La vallée de Bethmale en Couserans :
Le site ancien fortifié de Bramevaque est situé sur la commune de Tournac.
Il vaut mieux consulter les sites de spécialistes et celui que j'ai trouvé décrit bien l'ensemble fortifié dont il ne reste que la tour. Voir donc :
"http://www.histariege.com/arrien_en_bethmale.htm
Description et analyse de l'auteur
"Le deuxième texte est de l'abbé Cau-Durban lui-même. Il est extrait de l'ouvrage "la vallée de Bethmale" qui fut écrit suite à l'ascension du Mont Vallier en août 1885 par l'abbé. On y apprend, lors de ces trois jours mémorables, que l'abbé a "récemment découvert" à Bramevaque "une épée de fer, des boucles de cuivre, des éperons et un denier de Charles VI".
Par cette monnaie, on sait que le castel a pu être construit au moins avant la fin du quatorzième siècle, lorsque sévissaient les luttes méridionales entre seigneurs d'Armagnac, de Foix-Béarn et de Comminges, et que le roi Charles VI dut intervenir.
En 1389, Gaston Fébus, qui le reçut à Mazères, étant sans descendance, conclut avec lui un contrat dans lequel il devait donner à sa mort ses terres de Foix-Béarn à la couronne de France.
Mais Charles VI, après son retour dans son petit fief de Bourges qu'était devenu la terre royale de France, devint fou et le contrat fut annulé. Nous pouvons penser qu'un peu de ces épisodes ait eu lieu en Castillonnais et dans le Castel de Bramevaque.
Les deniers royaux, monnaie d'argent d'une certaine valeur, ne se retrouvent pas souvent en Gascogne et Languedoc, qui battaient leurs propres monnaies à Morlaas et Toulouse (toloza).
Enfin, la partie qui concerne le Moyen-Age du musée archéologique de l'abbé Cau-Durban est succinctement décrite par Félix Pasquier, archiviste départemental de l'Ariège. Il signale "des épées, des lances" et aussi que "la période du Moyen-Age n'a pas été oubliée et est représentée par quelques curieux spécimens de divers arts".
La tour a donc livré des lances, des épées, des éperons, des monnaies de Toulouse et de France, enfin des "boucles de cuivre", qui sont peut-être des boucles de ceinture et signaleraient une haute antiquité, peut-être wisigothe, mérovingienne, ou vasconne.
Les armes de guerre (lances et épées) et les éperons (monture à cheval) ne font certes pas partie de la panoplie du paysan traditionnel. Elles indiquent la nature défensive du Castel, dont nous pouvons penser qu’il abrita un temps une petite garnison.
Il faut dire que le plan de construction des châteaux du Comminges offre nombre de ressemblances avec celui de Bramevaque, (Couserans NDLR) notamment par exemple à Marignac dont la voûte en berceau est similaire, et à Lès, qui possède aussi des murailles.
Ce château s’intègre dans l’ensemble des forteresses des Pyrénées centrales (Couserans, Comminges, Aran, Bigorre), qui présentent un type de plan comparable : une tour réduite et aveugle (plutôt qu’un grand donjon seigneurial), des enceintes concentriques qui se prolongent par la constitution d’un terroir, une multiplication de petits bâtiments intra et extra muros.
Plutôt que des constructions fortifiées affirmant les puissances comtales, certains chercheurs voient dans ces constructions l’effort des communautés villageoises pour s’adapter au contexte féodal guerrier des XIIe et XIIIe siècles
Aucun texte ancien ne concerne le castel de Bramevaque. Seul Tournac est mentionné, dans deux textes qui font partie de la série concernant le Castillonnais templier, et que l'abbé Cau-Durban ne connaissait pas. Ce sont des actes de donations, tous deux rédigés à Castillon.
Dans le plus ancien (Baby 13), daté entre 1176 et 1187, Bidias de Toranag lègue aux templiers, pour cent trente sous morlaas, les droits et les familles qu'il possède, en paréage avec At d'Aragon, dans le casal de Ioan et de son frère Amel de Semeac, le hameau de Samiac tout proche du castel.
Dans le deuxième (Baby 29), daté de 1270, Bernard d'Orchein, procureur de la commanderie de Montsaunès, met Bonnefemme de Tournac et son héritier en possession de la moitié du casal de Boliarot, à Audressein.
Ces textes nous renseignent très peu en ce qui concerne le Castel de Bramevaque. Tout au plus peut-on dire que Tournac est une terre alleutière, libre de droit, puisque ses ayants-droits peuvent tester, et qu'elle est plutôt tournée vers la vallée du Lez et Castillon que vers celle de Bethmale.
Si l'on considère en outre le cadre juridique typiquement gascon, où les femmes (quand elles sont aînées) peuvent être héritières et posséder des domaines ruraux, il est donc possible qu'une petite seigneurie rurale se soit développée à Bramevaque et Tournac".
On verra la prochaine fois comment les villages se sont bâtis autour de ces forteresses qui les protégeaient avec leur plan commun de ferme de montagne. Même si comme à Bramevaque en Barousse, il est construit sur les rochers et que pour qu'il y ait des jardins et des vergers, il a fallu que les habitants s'activent dans des travaux de Titans ! ne pas oublier que les hommes mesuraient entre un mètre cinquante et un mètre soixante et que les femmes, elles, étaient plus petites : un mètre quarante/un mètre cinquante maximum !
Admirable quand on voit nos anciens quartiers.....
A la prochaine....Bonne promenade dans nos Bramevaque pyrénéens !
A suivre
Jackie Mansas
26 mai 2021