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Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Actualités d'hier et d'aujourd'hui sur les Pyrénées Centrales, au travers de l'histoire d'une famille, celle d'un "pays", celui des Pyrénées. Le passé est omniprésent avec celui d'un petit peuple : la Barousse...


Barbazan : le château et les seigneurs

Publié par Jackie Mansas sur 5 Octobre 2017, 17:42pm

Catégories : #Culture et société pyénéennes

Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan
Château et village de Barbazan

Château et village de Barbazan

La baronnie de Barbazan

 

 

La seigneurie de Barbazan en Nébouzan appartenait à la branche de Mauléon de Barousse et relevait du comté de Foix. Mais elle était beaucoup plus représentative et considérée.

 

Contrairement aux cousins baroussais, les barons de Barbazan n'ont pas eu de problèmes avec les habitants mais quelques frictions avec les représentants du roi qui contestaient les fonctions publiques du baron. Elles furent très vives à plusieurs reprises comme en 1662, lorsque Jean-Jacques de Mauléon déposa son dénombrement. Il prétendait au titre de juge curial de Rivière et pour cela, devant les dénégations des officiers royaux de justice, il invoquait deux jugements antérieurs à l'Administration : un dénombrement de Géraud de Mauléon du 24 janvier 1542, un autre d'Arnaud-Guilhem de Mauléon du 3 octobre 1478, hommage à Madeleine de France, princesse de Viane, en sa qualité de comtesse de Nébouzan.(1)

 

Plusieurs membres de cette famille eurent des fonctions plus qu'honorables comme le commandement des châteaux de Bramevaque en Barousse et de Saint-Béat en Comminges.

 

Géraud de Mauléon fut nommé le 15 décembre 1599 capitaine forestier des châtellenies de Frontignes et de Luchon.

 

La Coutume de Barbazan (2) produite par les Consuls de Barbazan devant le Parlement de Pau lors de l'accession d'un membre de la famille d'Astorg à la seigneurie de Barabzan en 1725, défendait les droits et privilèges de la communauté et nous sommes un peu surpris par l'entente qui existait entre elle et son seigneur. Lorsque la seigneurie changeait de "mains", il était obligatoire de présenter cette Coutume pour se préserver en cas que...

 

Cela se produisit en 1691, lorsque le lieutenant-Général Bernard d'Astorg d'Aubarède, né à Barbazan en 1630, succéda à Jean-Jacques de Mauléon son oncle. En 1639, par mariage, cette famille de Bigorre était entrée dans celle de Barbazan en Nebouzan.

 

En 1710, Bernard mourrait sans héritier et ce fut son frère Jacques qui lui succéda. Quatre générations d'Astorg suivirent jusqu'à la Révolution (3). De baronnie, la seigneurie devint marquisat.

 

Louis de Froidour rapporta au roi ses impressions sur le château et sur Jean-Jacques de Mauléon en 1667 lors de son séjour en terres commingeoises et baroussaises. Il reçut un accueil chaleureux de la part du seigneur et de son épouse ce qui le consola sans doute de la rudesse et de l'entêtement des Baroussais :

 

" Le chasteau, comme je vous l'ay desja dit, est au-dessus (de la source). C'est une maison toute en pavillons, bastye de marbre brut et couverte d'ardoise, mais qui n'est faite qu'à moitié non plus que la basse-cour. Le seigneur du lieu et qui en porte le nom est un gentilhomme de qualité de la maison de Mauléon, fort honneste homme et qui s'est tousjours fort distingué du commun de la noblesse du pays ; j'ay mesme remarqué qu'on avoit contre luy quelque jalousie. Telle guerre civile que nous ayons eue, jamais il ne s'est départy du service du Roy, et comme il vit en homme de bien, j'ay remarqué qu'il estoit autant accredité parmy le peuple de la vallée de la Garonne qu'il faisait jalousie aux gentilshommes voisins, qui sont tous gens de Gascogne peu accomodez. Sa femme est de la maison de la Molette ; elle est d'une taille fort belle et se tient propre et bien vestue, au-delà de tout ce que nous avons veu de noblesse campagnarde. Elle n'est ny belle ny layde, mais il n'y a rien de plus modeste, de plus honneste et de plus civil. Il y a mesme de l'excès à sa civilité et quand j'aurois esté un roy, on ne m'en auroit point fait davantage que j'en ay reçu dans cette maison ; ny le mary ni la femme n'ont pas manqué au moindre petit soin et on n'y a fait très bonne chère" (4).

 

Il nous laisse un extraordinaire témoignage sur la société féodale dans ce petit coin des Pyrénées.

 

1 - le château n'est pas terminé, il est une maison dont les toits sont en ardoise et les façades ornées de marbre

 

2 - la basse-cour est l'espace devant le château réservé aux habitants - il ne s'agit pas du tout de l'enclos à volailles !

 

3 - le baron de Barbazan est dit "gentilhomme de qualité et honnête homme", c'est-à-dire qu'il est fidèle au roi, agréable, distingué, lettré et qu'il pratique les bonnes manières envers tout le monde. Aussi est-il apprécié par le peuple mais jalousé par ses homologues de Gascogne que l'on devine rustres et peu aimables ! Vu l'accueil qu'il a eu en Barousse, on peut comprendre son dépit.

 

4 - et enfin, on a la description d'une femme ! d'accord de la noblesse mais bon, on s'en contentera pour cette fois !

 

La baronne est grande et "propre" ! "bien vêtue" ! Vu qu'il fait cette remarque, cela veut dire sans doute, qu'il a été choqué par la tenue des nobles ... de l'autre côté de la Garonne ! Et cette dame lui plaît car elle est modeste et accueillante, ni belle ni laide, ce qui veut dire quelconque. Après tout, ce que l'on demande à une femme ! Mais et surtout, le couple sait recevoir : "on n'y fait très bonne chère". Outre le fait qu'il rapporte fidèlement au roi ce qu'il voit, ce qu'il éprouve, il envoie tout de même une pique aux nobles de Barousse et on sent confusément qu'il ne va pas être si conciliant que cela avec eux.

 

Le Grand-Maître des Eaux et Forêts créant la Maîtrise de Comminges, en confiera la fonction au seigneur de Barbazan. Plus tard, les Astorg donneront encore plus d'éclat à la famille et à la ville et garderont la fière devise des Mauléon "Jamais ne change".

 

 

Les Astorg.

 

 

Cette famille était donc depuis le 17ème siècle propriétaire de la terre et de la seigneurie de Barbazan. Lorsqu'un changement survenait dans la possession d'une seigneurie (héritage, achat, mariage), le nouveau propriétaire et les habitants compilaient leurs droits et leurs devoirs respectifs dans des documents très officiels, selon un rite de tout temps respecté. D'après le dénombrement de Charles d'Astorg produit en octobre 1727, ses possessions s'étendaient en majorité sur le territoire de Barbazan et sur quelques parcelles de Labroquère et de Sauveterre-de-Comminges. Il tenait et jouissait d'un château avec grange, jardin, pigeonnier, courteil, verger, quatre métairies avec granges, jardins, vergers, champs, prés : Burs, la Mourère, Cot dit Gez, Vignau (cette dernière disposant d'une fontaine d'eaux minérales avec les bains), un moulin à blé - sans doute Patoye - et vingt-cinq pièces de terres labourables et de prés, le tout couvrant une cinquantaine d'arpents. (5)

 

Il prenait de ses emphytéotes, de chaque habitant, par feu allumant, chaque année à la Toussaint : deux mesures d'avoine, un coussé de froment, un coussé de milhet, une poule et à la Nativité de Notre-Dame, un poulet. Il avait le droit de taxer le vin vendu dans les tavernes de Labroquère ainsi que les viandes vendues dans les boucheries du même lieu (6).

 

Au point de vue politique et administratif, Charles d'Astorg était un des quatre gentilshommes curiaux de Rivière et de ce fait rendait la justice civile et criminelle en première instance avec un assesseur "en robe longue", un greffier, un bayle, nommés aux lieux de Barbazan, Labroquère, Gourdan, Ardiège, Labarthe. Ce privilège était héréditaire mais pas de père en fils. Il devait hommage au roi, vicomte de Nébouzan et en tant que seigneur, il rendait la haute, moyenne et basse justice dans les lieux de Barbazan et Labroquère avec le pouvoir d'y établir juge, procureur fiscal, greffier et bayle. Il avait également le droit de nommer les consuls, de recevoir les prestations de serment et de décider des amendes et confiscations.

 

Le 3 février 1725, lors de l'accession de Charles d'Astorg à la seigneurie de Barbazan, les consuls de la communauté produisirent à nouveau une déclaration des privilèges et des coutumes du lieu sans doute pour prévenir d'éventuelles exigences. Ils reconnaissaient que la justice appartenait au roi et était exercée par les nobles curiaux de Rivière : Labarthe, Ardiège, Gourdan, Labroquère.(7)

 

A suivre

 

Jackie Mansas

10 septembre 2016

 

 

1 - A. Sarramon - Revue de Comminges 1968

2 - d'après les documents utilisés entre 1542 et 1759

3 - J. d'Astorg - Revue de Comminges 1987

4 - Paul de Castéran : lettres écrites par M. de Froidour - Revue de Gascogne - Archives départementales du Gers.

5 - Mesure de Paris : 1 arpent valait 100 perches environ 1/2 hectare (5000 m²). Admettons cette mesure : 50 arpents valaient donc 25 hectares (Dictionnaire Larousse)

6 - J. d'Astorg - Revue de Comminges 1987

7 - Revue de Comminges - année 1943

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