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Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Actualités d'hier et d'aujourd'hui sur les Pyrénées Centrales, au travers de l'histoire d'une famille, celle d'un "pays", celui des Pyrénées. Le passé est omniprésent avec celui d'un petit peuple : la Barousse...


Barousse : des Romains au Moyen-Age.

Publié par Jackie Mansas sur 19 Décembre 2017, 12:04pm

Catégories : #Culture et société pyénéennes

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Légende de la 3ème photo aérienne prise en paramoteur par Damien Bouissy :

Massif du Gert :

1 - mailh des Courbas

2 - mailh de Castéra

3- mailh de Mombourg

4 - mailh de Montégut

5 - mailh de Passade

6 - mailh du Picon

7 - mailh du Castéra

8 - pic de Pène Blanque Bagiry/Samuran

9 - pic du Gert

10 - col de la Hajolle

 

Massif du Hourmigué :

 

11 - mailh du Mayrou

12 -  Hourmigué

 

Bassins :

 

13 - bassin de Siradan/Saléchan/ore/Fronsac

14 - bassin de Bertren/Luscan

15 - Bertren village

16 - quartier de la Baderque et Couret à Bertren

17 - plaine de Luscan

18 - plaine de Luscan et village

 

Massif du Pujo :

 

19 - mailh de Herran à Luscan

20 -  Pujo de Galié

21 - Galié village

22 - goulet de Galié/Bagiry

23 - Petit Pujo de Galié et Pujo d'Ore

 

Autres :

 

24 - Massif du Pic du Gar

25 - le Burat

 

NOS ANCÊTRES LOINTAINS

 

Les populations préhistoriques qui se sont installées dans ces vallées abruptes et humides sont arrivées de Ligurie en longeant les côtes méditerranéennes. Cela ne s'est pas fait en une année oh que non ! Sans doute en plusieurs siècles avant que ces peuples puissent occuper totalement ce vaste territoire. D'abord chasseurs/cueilleurs puis agriculteurs itinérants suivant les brûlis pour créer des parcelles agricoles dans des endroits plats, proches des rivières et accessibles ; et enfin, quand la montagne, barrière infranchissable les empêcha de monter plus haut, ça et là, des lieux de vie naquirent. Nos ancêtres se sédentarisèrent, devinrent agriculteurs et une société patriarcale vit le jour.

 

 

Cette population était très peu nombreuse et s'éparpillait dans les vallées facilement accessibles en suivant les crêtes ou tout au moins à proximité sur des replats entre 600 et 800 mètres...car en en bas, avec ces rivières perpétuellement en folie, les terres cultivables ne l'étaient pas toute l'année : les crues monstrueuses détruisaient toutes les récoltes. Alors, où s'installèrent-ils ? Et bien là où ils ne risquaient rien, le long des pâtures d'altitude, attention pas les estives que nous connaissons à 2000 mètres d'altitude ! Non, non, dans les massifs qui suivent la Garonne.... 

 

 

Certains de ces villages existent encore, ils sont tout en haut des mailhs toujours comme des sentinelles. Tels Mont de Galié, Gouaux de Luchon,  Baren par exemple. Des vestiges d'anciens sites existent encore, comme Soueste sur Gaud, le site de la chapelle d'Esputs à Chaum ; et dans le Pujo de Galié, le site en ruine situé à 650 mètres d'altitude qui est constitué :

 

- d'une parcelle close de murs sur trois côtés et surplombant à l'ouest la plaine de la Garonne dont Bertren en fond.

- d'une cabane en ruines contre la pente, protégée par le bois mais vu la configuration, il se pourrait que d'autres habitations existaient aux alentours. Le tout est boisé et il est difficile de bien voir Bertren juste en face au nord-ouest mais on aperçoit les mailhs de Courbas, du Castéra, du Mombourg et du Montégut.

 

 

Situé à une cinquantaine de mètres du sommet, il se trouve plus bas en altitude que le Gert en face à l'ouest, mais se trouve en début d'une ligne virtuelle rejoignant la tour de Bramevaque en passant par le col de la Hajolle à Samuran où devait se trouver dès le début de l'occupation des massifs, une tour de guet. La création de la piste forestière a détruit toutes ruines qui auraient pu attester de la présence en ces lieux d'un poste d'observation.  La Hajolle se situe entre le pic de Pène Blanque et celui du Gert "frontière" entre Samuran  et Bagiry/Siradan. 

 

On retrouve également quelques vestiges sur les pentes du mailh de Barbazan plus faible en altitude. Ces sites ont été abandonnés tardivement vers le 18ème siècle mais ont été cultivés pour la plupart jusque vers les années 1970... sauf celui de Galié qui disparaît des radars vers 1850.

 

 

Voici dans la photo suivante ce qu'on peut voir de la plaine et de Bertren actuellement : les arbres empêchent une vision à 180° comme elle devait l'être jusqu'au 20ème siècle.

 

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 Pujo de Galié : environ 680 mètres d'altitude.

Bertren : 450 mètres.

 

1 - village

2 - piste forestière menant du lieu dit du Pujoulet, quartier du Bernet, dit de la Lande au chemin d'Ilheu côté Anla

3 - castet

4 - mailh de Passade

5 - chemin ancien, voie de communication ancestrale de la Débarrade vers Ilheu et Anla

6 - Rocher de l'Echo qui servait de poste de surveillance vers Luscan et Burs mais surtout vers le Mombourg où se trouvait, en dessous des prés d'Escalamas, la grotte dite des Résistants, plus quelques abris préhistoriques des chasseurs/cueilleurs/bergers ouverts au sud en ligne de mire du castet. Il avait son pendant à Luscan, au-dessus du château sur le chemin menant aux estives de la crête mais aussi à Galié et Sauveterre de Comminges. En effet sur le flanc de la montagne, il existe une sorte de plate-forme rocheuse emménagée comme poste de guet. On retrouve le même emplacement dans le Pujo de Galié, sur le chemin de Ségalas,  tourné vers Siradan, Ore, Fronsac et Marignac en fond.

 

Il fallait une certaine surface aplanie et à l'abri des vents dominants afin de faire brûler des feux en cas de guerre ou d'invasion. L'abri était toujours bâti contre la montagne.

 

Il y avait toujours à proximité des tours de guet et de signaux tout comme des donjons, dans la montagne, un emplacement emménagé pour la surveillance, les gardes communiquaient par signaux et cris d'animaux, comme par exemple le hululement des chouettes... en plein jour ! Comme les portables à carte n'existaient pas durant la guerre 39-45, les Résistants utilisaient les mêmes méthodes.

 

J'avais demandé à un des leurs qui me racontait la chose, si les Allemands n'avaient pas trouvé drôle que la chouette hululait en plein jour ; il m'a répondu avec humour, qu' "ils n'avaient pas pu reconnaître ce chant tout simplement parce qu'en Allemagne, chez les nazis, tout se faisait à l'envers... ". Pour répondre à cela....

 

Tous ces points stratégiques ont été utilisés durant la guerre par les Résistants. Il est plus que probable que le site du Pujo a eu une fonction essentielle pour non seulement surveiller la plaine de la Garonne de St-Bertrand de Comminges à Marignac mais aussi pour établir un camp en toute sécurité.... car pour y accéder, il faut un certain sens de l'équilibre et je me demande comment j'ai pu faire pour le trouver alors qu'il faut passer au-dessus d'une barre rocheuse...! Pour quelqu'un qui souffre de vertiges récurrents... c'est un exploit mais comme je passe ma vie dans la lune et que les anges gardiens existent, pourquoi s'étonner ?

 

N'empêche, rien que d'avoir dit que j'avais découvert cet endroit a déclenché un séisme : je me demande toujours quel mal j'ai pu faire pour qu'y revenir m'est devenu .... interdit !

 

7 - chemin qui a disparu en partie après la source de la Baderque et qui débouchait sur le chemin du Montégut, voie ancestrale menant au gué sur la Garonne (quelques ruines du poste de guet tenu par les cagots qui exploitaient les bois du Montégut et du Mombourg) pour le compte du seigneur du village.

 

 

Pour le situer dans le Pujo.

 

Toutes ces photos montrent  que l'espace est boisé entièrement et sans doute depuis fort longtemps car il n'y a ni ronces ni orties sous le couvert. Le mur de clôture (photos 4 et 5) s'est écroulé en partie mais il est très typique des murs anciens, il est large et composé des pierres ramassées sur le site lors de l'aplanissement de la clairière. La photo 3 montre l'entrée branlante de la cabane. La dernière est triste : la cabane est en ruines...

 

On remarque sur la première un monstre blanc, poilu, frisé et sans doute éminemment dangereux ! Un fantôme ? Venu du Moyen-Age ? Ouh la la !

 

Mais non, c'est Shinook ma jolie et douce petite chienne !

 

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Nous reviendrons sur le maillage urbanisé en plaine comme en montagne mais pour l'heure, intéressons-nous aux siècles qui se succèdent lorsque Rome vivait en Pyrénées.

 

Le premier siècle de l'occupation romaine se passe dans l'effervescence car il faut construire, défricher, installer les domaines, réguler les sources et les rivières, pacifier les populations autochtones et ... s'enrichir malgré que Lugdunum se trouve trop éloigné des grandes voies romaines.

 

Le IIème siècle s'annonce différent. Une religion nouvelle se répand, la foi chrétienne remplace le culte d'Abellio sur le rocher de Lugdunum.

 

En 407, les Barbares qui toquaient depuis fort longtemps aux portes de l'empire, à l'Est, forcent le Rhin. Les Vandales, les Alains, les Suèves déferlent sur la Gaule, saccageant tout sur leurs passages, pillant, brûlant et massacrant avec un plaisir évident les populations dont les survivants furent tellement choqués psychologiquement par une telle violence qu'ils transmirent le traumatisme aux générations suivantes.

 

Les provinces du Sud, Novempopulanie et Narbonnaise, sont dévastées durant trois longues années, les envahisseurs cherchant une ouverture vers l'Espagne. Mais les ports restent obstinément fermés d'octobre à mai à cause de la neige - de toute façon, vu le relief et la configuration des passages, ils ne pouvaient passer en convoi de chariots avec le bétail - et les Convènes veillent en embuscade...

 

Cette année 407 fut un séisme total : les Vandales détruisirent la cité antique de Lugdunum ainsi que tous les environs mais la population avait eu le temps de se réfugier dans les montagnes de Barousse. Pratiquement impénétrable sauf par le goulet de Sarp et celui de Siradan, elle resta à l'abri des exactions barbares.

 

Qui étaient les Vandales ? Un peuple germanique originaire des régions orientales de l'Europe Centrale au bord de la mer Baltique. Au début du Vème siècle, ils sont chassés de leurs terres par les Huns et forcent alors, en compagnie des Suèves - peuple germanique également originaire de la mer Baltique - et des Alains venus du Caucase, le Danube puis le Rhin et se retrouvent dans les Pyrénées.

 

Ces peuples conquérants passent ensuite en Espagne par les deux bouts de la chaîne, seuls passages possibles et les Suèves fondent le royaume de Galice. Les Alains et les Vandales sont alors chassés de la péninsule et se répandent en Afrique du Nord jusqu'à Carthage. 

 

Les lourds convois de chariots partis pour traverser le Perthus et la Bidassoa, le silence retombe sur notre païs. Les Convènes et Gallo-Romains redescendent des montagnes pour retrouver une plaine dévastée et des villes ruinées. Nous sommes en 410 et l'effervescence pour tout reconstruire est intense mais l'effroi causé par l'invasion pousse les populations à entourer les villages construits sur les collines ou bien à mi montagne, de fortifications épaisses et imprenables.

 

En 419, les Wisigoths occupent tout le sud de la Gaule. Payés par l'empereur Honorius pour refouler les Barbares en Espagne, ils succèdent aux Romains sans heurt ni violence. Seuls les Convènes ne se soumettent pas facilement... et oui, le caractère montagnard.. !

 

En 507, Alaric, empereur des Wisigoths, est tué à Vouillé et Clovis devient le maître de la Gaule. Les Wisigoths fuient en Espagne.

 

A partir de cette année commence alors la véritable histoire de la France.

 

Mais les vallées hautes pyrénéennes continuent de s'administrer conformément aux traditions, restant dans leur isolement. Les montagnards se dressent contre les rois francs à chacune de leurs incursions. (1)

 

A suivre

 

Jackie Mansas

19 décembre 2017

 

NOTES

 

1 - Jean-Léonard Pène :"La Barousse"

 

Les textes sur l'histoire de la Barousse sont tirés de ma thèse de doctorat soutenue et obtenue le 24 juin 1983 à la faculté d'Histoire de l'Université de Toulouse le Mirail, devenue Jean-Jaurès.

Titre : "Les communautés forestières de Barousse et la forêt du 17ème au 19ème siècles."

 

Vous pouvez consulter l'ensemble dans les numéros anciens de la Revue de Comminges à partir de 1984.

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