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Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Actualités d'hier et d'aujourd'hui sur les Pyrénées Centrales, au travers de l'histoire d'une famille, celle d'un "pays", celui des Pyrénées. Le passé est omniprésent avec celui d'un petit peuple : la Barousse...


Destins de femmes...

Publié par Jackie Mansas sur 19 Février 2016, 12:25pm

Catégories : #Les femmes des Pyrénées autrefois

Plats de fête à la Libération : œufs mimosas, saucisson cornichons, poulet fermier aux pommes de terre sautées, fromage de Barousse, salade de fruits...et café-chicorée !(photos internet)Plats de fête à la Libération : œufs mimosas, saucisson cornichons, poulet fermier aux pommes de terre sautées, fromage de Barousse, salade de fruits...et café-chicorée !(photos internet)
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Plats de fête à la Libération : œufs mimosas, saucisson cornichons, poulet fermier aux pommes de terre sautées, fromage de Barousse, salade de fruits...et café-chicorée !(photos internet)

Un mariage mixte à la Libération

Le temps était beau en cette fin d’avril 1945, les paysans avaient commencé à labourer et les attelages de vaches travaillaient vaillamment dans la plaine. Il faisait même chaud. Les mouches voletaient partout et les abeilles étaient sorties des ruches. Les gros bourdons envahissaient les glycines en fleur.
Le samedi 21 avril au matin, Marcelle s’habilla et se coiffa soigneusement. Le tailleur bleu marine qu’elle avait acheté pour l’occasion, - elle n’avait pas voulu de robe blanche se trouvant trop âgée à 29 ans pour la porter - était sage et soulignait son corps mince et bien fait. Elle était allée chez le coiffeur la veille faire faire un « indéfrisable » et elle gonfla ses cheveux ce qui lui allait bien. Elle étendit avec application la crème de soin qu’elle affectionnait sur son visage et rosit ses joues. Elle avait la peau très blanche et la couleur sombre du tailleur la mettait en valeur. Elle accrocha sa jolie broche en or sur le revers et le petit bouquet de fleurs sur la poche de la veste, vérifia ses boucles d’oreilles et chaussa des chaussures neuves qui lui faisaient un peu mal mais elle s’habituerait. Puis elle saisit la bouteille d’eau de Cologne à la violette et déposa quelques gouttes dans son cou. Elle plaça un joli chapeau blanc et bleu sur sa tête puis satisfaite du reflet que le miroir lui renvoyait, elle descendit rejoindre Madame et les enfants.
Monsieur se préparait.
Ils partirent gaiement vers la ferme des Poutchet. Les villageois qu’ils croisèrent lui souhaitèrent beaucoup de bonheur. Elle remercia tout le monde en essayant de cacher son émotion. Elle pensait à Simon et elle imagina sa sœur Marie-Louise en train de l’aider à se vêtir ! Lui qui était habitué à vivre débraillé devait, pour l’occasion, porter le costume qu'elle lui avait choisi ainsi que la cravate ! Elle sourit à l’idée qu’il allait devoir supporter ce supplice toute la journée. Mais bon, se dit-elle, on ne se marie qu’une fois, alors, autant le faire bien.

 

 

Madame, qui était son témoin, portait élégamment une très jolie robe beige et un manteau léger assorti. Son maquillage était parfait et ses bijoux nombreux. Elle était « en cheveux », sa mise en plis mettait en valeur sa blondeur naturelle.

 

 

Marcelle fut rassurée quand elle entra dans la maison Mansas, toute sa famille était déjà là : sa mère Catherine, toujours vêtue de noir, sa sœur Fernande, très élégante dans un ensemble chic qui s’accordait à merveille avec un chapeau en velours violine, ses frères : Joseph toujours célibataire et René accompagné de son épouse Yvonne simplement habillée mais coiffée d’un bibi ravissant qui éclairait son joli visage. Tout le monde avait fait un effort vestimentaire tant du côté français que du côté italien ! C'était vrai : on ne se mariait qu'une fois alors ...
Joseph passa le bras de sa petite sœur autour du sien et en procession, ils se dirigèrent vers la mairie ... 50 mètres. Ils montèrent l'escalier tout en devisant gaiement jusqu'à la grande salle du premier étage et prirent place sur les chaises qui avaient été briquées pour l’occasion. Marcelle eut la surprise de voir Monsieur s’asseoir derrière elle, il avait décidé d’être son témoin à la place de sa femme.

 

Jean-Marie Lamoure, le cousin germain de Simon, adjoint au maire « à vie », les maria et tout le cortège se reforma pour se diriger vers l’église, Joseph marchant à l’arrière avec sa sœur, très fier de sa fonction. Simon avançait devant avec sa mère toute de noir vêtue elle aussi, la tête couverte par un chapeau un peu usé, elle n'allait pas dépenser de l'argent pour un couvre-chef neuf !
Sa sœur Marie-Louise toujours habillée à la dernière mode, son frère Bertrand revenu en convalescence au mois de mars - il avait sauté sur une mine à Belfort alors que son régiment poursuivait les combats vers l'Allemagne et avait survécu à ses blessures - ses nièces Janine très jeune fille à 14 ans et Anne-Marie jolie poupée de 5 ans, gracieuses dans leur tenue de fête et leurs cheveux retenus par des rubans, sa belle-sœur et son nouveau mari et sa tante Victorine qui arborait fièrement un chapeau noir à plume des années 20 ainsi que quelques bijoux de prix, suivaient en devisant. Les cousins, la famille de la mariée et les témoins venaient ensuite. Madame et Monsieur bavardaient avec tout le monde et les deux garçons couraient à côté des filles.
Les cloches sonnaient à toute volée et quelques villageois se tenaient sur la place devant l’église, les enfants riaient et se poursuivaient. Il y avait tout de même un peu de crainte dans l’air car les Allemands n’étaient pas encore tous partis (1) mais Cou de Cigogne avait disparu depuis pas mal de temps. Personne ne savait où il était pourtant les résistants avaient monté une garde discrète depuis juin 1944 autour de la kommandantur et du siège de la Gestapo à Luchon pour le « choper, ni vu ni connu » comme ils ne cessaient de le répéter. Plus d’un rêvait de lui tordre son drôle de cou ! Mais le SS avait été plus malin : dès qu’il comprit que la guerre était perdue, il prépara sa disparition dans la plus complète discrétion.
Le curé attendait sous le porche. Le cortège se forma, Simon et sa mère entrèrent en premier. Lorsque tous les invités et les paroissiens furent installés sur les chaises et les bancs, l’harmonium lança les premières notes du cantique d’accueil « Gloire à Dieu Seigneur de l’univers » et Marcelle, au bras de son frère remonta l'allée, tellement émue qu’elle tenait ses yeux à demi fermés. Ce matin-là, dans la lumière poudrée de la nef, ils étaient gris comme l’acier.

 

Elle rejoignit sa place et la messe commença. Comme c’était le premier mariage depuis le début de la guerre, les dames de la paroisse, Marie Coulom, Mauricette Cap et Marie Mondon chantèrent les cantiques de mariage avec ardeur. Leurs belles voix puissantes accompagnaient l’harmonium et montaient vers la voûte….
Les mariés échangèrent les consentements alors qu’il régnait dans l’église un silence total.
La lumière entrait par les vitraux et éclairait le chœur d’une douce chaleur.
Quand la cérémonie fut terminée, les mariés et les témoins signèrent les registres tandis que le cortège rejoignait les villageois sur le parvis. Marcelle et Simon, désormais unis, quittèrent l’église alors que l’organiste jouait « Jésus que ma joie demeure ».
Dehors, sous le soleil, ils furent accueillis par des vivats et Amélia Pascal leur jeta des fleurs. Elle les avait cueillies pour l’occasion dans son jardin. Marcelle en fut touchée aux larmes et la remercia. On se plia bien volontiers aux photos car Fernande avait couru tout Bordeaux où elle résidait pour trouver une pellicule - malheureusement de mauvaise qualité mais il y aurait le souvenir - voulait à tout prix jouer les photographes pour sa soeur....
Les félicitations fusèrent de toutes parts et alors que les cloches sonnaient à nouveau à toute volée, les hommes du village entrèrent dans le café Castex pour fêter l’événement avec un bon canon de vin.
C’était Simon, enfin Félicie (au diable l'avarice !), qui régalait… pour une fois, il fallait donc en profiter car cela ne se renouvellerait pas de sitôt et les invités ne se firent pas prier pour trinquer… plusieurs fois ! Tout le monde connaissait son avarice et d'ailleurs on ne disait pas « avare comme Harpagon » mais « avare comme Félicie » !
A la sortie de la messe, ils sont officiellement mari et femme !

A la sortie de la messe, ils sont officiellement mari et femme !

En procession, le mariage rentra à la ferme pour le repas. On commença par l’apéritif, on avait réussi à en trouver chez le marchand de vin itinérant, il avait été commandé depuis pas mal de temps. Madame Pachère la cuisinière du village, avait fait des merveilles pour composer le menu malgré les restrictions car presque tout venait de la ferme et avait été soustrait à l’avidité des réquisiteurs l'an passé :

 

- saucisson coupé en tranches fines entourées de rondelles de cornichons
- pâté et jambon roulé avec quelques olives noires (hors de prix !)
- œufs mimosas sur un lit de feuilles de laitue
- poulets fermier rôtis au four et leur farcis aux jeunes morilles accompagnés de pommes de terre sautées dans le jus avec des petits oignons confits
- fromage de Sost
- salade de fruits et ses petits gâteaux confectionnés maison.
Tout était abondant, on pouvait se resservir au moins deux fois. Pour le repas du soir, en plus des restes, elle avait prévu une soupe de légumes qui ferait digérer celui de midi.
Les mariés s'assirent aux places d’honneur et tout le monde les imita dans la plus joyeuse cohue. Les enfants, affamés, attendaient, la serviette autour du cou et les coudes sur la table. La tante Victorine remit de l’ordre, il fallait bien se tenir ! Madame Pachère qui était évidemment invitée, se plaça en bout de table à côté de la cheminée et de la cuisinière car elle devait servir les plats. Les félicitations arrivèrent très vite, tous les convives mangeaient de bon appétit. Il y avait si longtemps que l’on n’avait pas fait la fête ! On devait se rattraper et on se rattrapa ....
Catherine essayait de suivre les conversations mais ne se risqua pas à discourir car elle parlait « charabia ». Elle était assise à côté de Fernande qu’elle ne voyait pas souvent et se réjouissait du bonheur et de la joie qui régnait autour d’elle. Néanmoins, elle ne pouvait se débarrasser de la grosse boule qui lui nouait l’estomac. Elle avait un mauvais pressentiment mais elle essayait de participer pleinement à cette belle journée.

 

Bertrand mangeait la tête baissée et sa nièce Janine la fille de son frère aîné Jean-Baptiste décédé en 1935, se tenait contre lui. Ils n’avaient que dix ans de différence et en fait, avaient grandi ensemble. Depuis qu’il était revenu, la jeune fille de 14 ans ne le quittait guère, restant proche de lui.

 

A un moment donné, la conversation porta sur « l’empoisonnement » de la kommandantur. Les rires éclatèrent à l’évocation de la déroute des SS ce jour-là et quelqu’un fit judicieusement remarquer que personne ne savait ce qui s’était vraiment passé. Les maquisards n’étaient pas revenus dans le pays, on ne les connaissait pas et sans doute étaient-ils en train de combattre en Allemagne s’ils n’avaient pas été tués avant !

 

Bertrand sourit et dit malicieusement :
- Ils nous ont rejoints à Alger et nous ont raconté leur histoire !

 

Des oh et des ah fusèrent et tout le monde le pria d’en faire le récit. Il s’exécuta :

 

- Le cuisinier s’était fait engager pour surveiller la kommandantur et renseigner la Résistance. Il était de Toulouse mais je ne sais pas ce qu’il faisait avant la guerre. Toujours est-il que Cou de Cigogne était satisfait de ses services. Il avertissait la Résistance lorsque celui-ci arrêtait des maquisards après dénonciation, bien entendu. Les résistants s’organisaient pour surveiller les convois qui partaient pour Toulouse et les attaquer. Souvent ils réussissaient et les représailles ne tardaient pas.

 

En octobre dernier, il décida de tenter sa chance. Il venait de voir arriver quatre hommes dans un sale état et avait dû confectionner pour eux, une soupe infâme. Pour lui, ce fut la goutte qui fit déborder le vase. Comme il rêvait de participer à la reconquête de la France en rejoignant l’armée des alliés soit en Algérie soit au Maroc, il décida d’agir.
Une vieille femme qu’il avait connue chez son ami le passeur – qu’il accompagnait parfois - lui donna, en l’obligeant au secret le plus total, une petite fiole contenant une poudre qu’elle avait fabriquée à partir de plantes. En fait, cette poudre sert à soigner une maladie, je ne me souviens pas de laquelle mais prise à forte dose, elle déclenche des coliques terribles avec des « courantes » carabinées ! Il réfléchit longuement et quand il vit arriver trois hommes de plus, il n’hésita plus.

 

Mais comment introduire la fiole dans les cuisines de la kommandantur ? Chaque matin quand les employés arrivaient, ils étaient fouillés entièrement. Et un soldat restait en permanence avec eux, surveillant tous leurs gestes.

 

Après une nuit à mettre son plan au point, il prit sa décision, il savait comment rendre les Allemands inopérants. Il fallait qu’il sauve les sept hommes dont un jeune de 16 ans à peine et s’enfuir avec eux pour l’Afrique en passant par l’Espagne. Il cacha la fiole, se laissa fouiller tranquillement puis prépara à sa façon une solide pistache avec de l’épaule d’agneau pour que les SS se resservent. Ce qu’ils firent : elle était tellement succulente qu’ils s’en gavèrent. Et le reste vous le connaissez.
Toute l’assemblée avait écouté attentivement mais la question restait toujours posée : comment avait-il fait ?

 

Bertrand ne put retenir un fou-rire. Personne ne comprit pourquoi il manifestait tant de gaîté et on le pressa de questions. Il finit par lâcher :

 

- Réfléchissez bon sang : quel est l’endroit du corps que les soldats ne fouillaient jamais ?

 

Le silence tomba quelques secondes puis Joseph s’exclama :

 

- Dans le … ? Oh le porc !

 

Après un moment de flottement, les hommes éclatèrent de rire. Yvonne et Marcelle esquissèrent un sourire gêné, Marie-Louise et sa belle-sœur Fifi gloussèrent en se cachant la bouche derrière leurs serviettes. Fernande traduisit pour que sa mère puisse comprendre et Catherine fut choquée : on ne parlait pas de ces choses-là, cela ne se faisait pas. Fernande sourit, elle n’était pas bégueule mais enfin… causer de cela à table !

 

Félicie et Victorine n’ayant pas compris faisaient la gueule.

 

Victorine, qui ne savait pas se taire quand il le fallait comme il sied à une dame de bonne compagnie, somma son neveu :

 

- Dans le quoi ? Bertrand, on ne marmonne pas, on ne rit pas et on parle correctement ! Donc, tu me réponds : dans le quoi ?

 

Sa famille qui connaissait son mauvais caractère baissa la tête tout en pensant qu’elle n’avait pas été mariée assez longtemps pour savoir où l’on pouvait cacher sur soi une fiole sans que personne ne se doute de rien !

 

Ce fut le témoin du marié qui ne s’embarrassant pas de subtilités la renseigna abruptement :

 

- Dans le trou de balle, tiens donc !

 

Victorine poussa des cris horrifiés : mais comment pouvait-on dire des choses pareilles ! Et en plus en revenant de l’église après une messe de mariage ! Il y avait des oreilles chastes dans l’assistance et on ne pouvait plaisanter sur tout. Mais bon, les « oreilles chastes » s'en fichaient éperdument vu que leurs propriétaires mangeaient de bon appétit ...

 

Elle était partie pour une diatribe sans fin lorsque sa sœur arrêta le flot de commentaires :

 

- Qu’il l’ait mis où il a voulu c’était bien puisqu’il a réussi ! Après tout, si ça lui a fait plaisir à lui et si ça a arrangé tout le monde…
Là, les hommes en tapèrent du poing sur la table !
L’assemblée était hilare et le bon vin aidant, les hommes se mirent à chanter. Montagnes Pyrénées, Acquerras Montanhas, Le clocher du village, Sous le beau ciel des Pyrénées, Adishatz, Il pleut, il pleut bergère, Le temps des cerises, l’Avé Maria et tant d’autres firent craquer les vieilles solives du plafond.
Victorine essayait de garder un peu de dignité dans ce déferlement de réjouissance. Elle affectait un air sévère qui se changea en indignation lorsque son neveu Étienne, du haut de ses 17 ans tous neufs, entonna des chansons à la mode plutôt paillardes sous le regard malicieux de sa sœur Clémence qui attendait qu’il « fasse son malin » comme à son habitude. Il commença par « Les Belles-Mères », en alternant les deux voix, féminine et masculine et en poussant la turlutte à son maximum :
Lui : Tu me d'mandes pourquoi je suis triste, ma belle-mère est rendu à la maison Elle est toffe et rien ne lui résiste, quand elle parle elle à toujours raison

 

Elle : Si t'étais pas mou comme une chique, elle s'mettrait pas le nez dans tes chaudrons À ta place je prendrais une brique, j'y en donn'rais cinq six coups sur l'citron.
TURLUTTER
Lui : On voit qu'tu connais pas ma belle-mère, elle fait peur rien qu'à la regarder Elle a d'l'air d'une vieille sorcière, on dirait d'une vieille fille enragée

 

Elle : Puisqu'elle a si mauvais caractère, si t'avais pas d'l'air aussi tata J'y aurais dit : "Mêle-toi donc de tes affaires", j'y aurais montré de quel point tu chaussais.
TURLUTTER
Lui : Tout cela c'est bien facile à dire, s'il y en a qui veulent se marier Faites pas comme moi pauvre martyre, croyez-moi j'suis ben mal amanché

 

Elle : Dans la vie chacun a ses misères, moi je prends la vie du bon côté Si tu veux pour oublier ta belle-mère, tous les deux nous allons turlutter
TURLUTTER
Lui : Comme c'était hier sa fête, elle m'a demandé pour l'embrasser Comme elle prise et qu'elle sent la vieille pipe, j'ai manqué mourir empoisonné

 

Elle : Veux-tu que je te donne la manière, si tu veux bien t'en débarrasser Mets-y donc une bonne pilule dans sa théière, elle viendra plus jamais t'achaler.
TURLUTTER
C’était désopilant. Les applaudissements s’élevèrent, nourris. Simon riait tellement que deux larmes coulèrent sur ses joues. Marcelle se surprit à faire de même de bon cœur alors qu’elle n’aimait pas que l’on se moque des autres. Mais bon, ce n’était qu’une chanson.
Elle coula un regard vers les deux sœurs qui faisaient la gueule une fois de plus et roulaient de gros yeux en direction de leur neveu. Elle s'était attachée à cette dame, vraie paysanne dans l'âme et d'une dignité sans faille qui était devenue sa belle-mère le matin même et son agacement devant l'irrévérence de son neveu, lui fit un peu de peine car Félicie avait pris la chanson au premier degré.
On demanda à Étienne de rechanter. Il ne se fit pas prier. On entendit Victorine râler « Mais qu’est-ce qu’il chante, notre petit ! Ce ne sont pas des chants de chrétien, ça ! ».
Il faut dire que la foi comptait beaucoup dans cette famille vu que trois des huit enfants étaient entrés en religion très jeunes. Elle aussi d’ailleurs mais au moment de prononcer ses vœux, elle renonça et retourna dans sa famille. En fait, la supérieure du couvent excédée par le mauvais caractère de la novice, lui conseilla de mettre les voiles plutôt que de le prendre !

 

Après une nouvelle salve de bravos et heureux d’être le centre d’attraction, Étienne entonna une autre chanson encore plus grivoise « Les pantalons » qui fit le bonheur de tous mais qui attira l’ire de la tante bigote. On revint alors à un répertoire plus convenable.
Et c'est au café-chicorée avec une « goutte » d'eau-de-vie qu'il fit une énorme bêtise : il avait pris sa cousine Anne-Marie sur ses genoux pour lui montrer comment on faisait pour faire sortir la fumée de la cigarette par les oreilles (?) et en faisant le pitre pour qu'elle croie ce qu'il disait, il la brûla au bras sans le vouloir bien sûr : elle s'en souvient toujours tellement elle eût mal !
Et le soir, un bal improvisé réunit la jeunesse et les villageois. Il fallait bien fêter ce nouveau bonheur ainsi que la victoire prochaine. On dansa jusqu’au « bout de la nuit ».

 

Jackie Mansas

19 février 2016

 

 

avant le bal tous réunis....

avant le bal tous réunis....

1 - ils étaient tous partis mais les habitants n'y croyaient pas : tant que le Général de Gaulle ne dirait pas qu'ils avaient disparus de la circulation définitivement, ils se méfieraient !

 

On peut écouter la chanson de la québecquoise La Bolduc sur YouTube. Taper les Belles Mères ou bien turlute.

 

Ma mère m'a raconté son mariage des centaines de fois tellement ce jour-là avait été un beau jour. Une fois seulement elle avait mis un bémol : « il y a des choses que l'on ne raconte pas un jour pareil ! les Allemands n'étaient pas tous partis et on aurait pu se faire tuer » ! Je n'ai jamais pu lui faire dire ce que c'était mais un jour, alors que l'on discutait de la Libération et de la Résistance, elle a murmuré : « tu crois que c'était malin de raconter comment les Résistants ont rendu malade toute une garnison de SS qui aurait pu ensuite tuer tous les habitants si c'était sorti de la maison ? Cou de Cigogne n'aurait pas hésité, lui ! »

Connaissant les Pyrénéens et plus encore les Baroussais, je n'attaquais pas de front mais décidais de biaiser : « Tonton Bertrand a dit quoi ? tu peux me le dire, la guerre est finie depuis longtemps ! »

Raté : elle n'a pas répondu mais comme en 1970, le vieux monsieur de Luchon me l'a raconté…

Par contre, ce n'est que l'an dernier que j'ai fait le rapprochement…

Mieux vaut tard que jamais !

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