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Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Les caps bourrut des Pyrénées : rencontre avec les Baroussais d'autrefois

Actualités d'hier et d'aujourd'hui sur les Pyrénées Centrales, au travers de l'histoire d'une famille, celle d'un "pays", celui des Pyrénées. Le passé est omniprésent avec celui d'un petit peuple : la Barousse...


Les "immigrés" de Mauléon-Barousse : les charbonniers italiens dans les années 1920....

Publié par Jackie Mansas sur 16 Novembre 2023, 00:21am

Catégories : #Culture et société pyénéennes

 

Sous-titre : réponse d'une petite et très, très modeste citoyenne aux politiques qui ne veulent pas aider ceux qui n'ont plus rien...

Il n'est pas question  de dire qu'il faut accueillir toute la misère du monde mais il est quand même urgent de réfléchir à comment l'arrêter cette misère ! Comme cela, si l'on trouvait comment se débarrasser définitivement des scories de la décolonisation qui n'est rien d'autre que la misère du monde actuelle, on ne verrait plus tous ces pantins de pouvoir gesticuler pour ne rien dire d'intelligent… donc d'humain ! Cela nous ferait des vacances….

L’« Aquarius » est arrivé dans le port de Valence dimanche 17 juin en fin de matinée.

Photo copiée dans l'article du Monde dont voici le lien :

L

Enfin arrivés à Valence, les migrants de l’« Aquarius » sont « fatigués mais remplis d’espoir »

Les 630 naufragés secourus par le navire humanitaire avaient été répartis sur trois bateaux, arrivés à bon port, en Espagne, après une semaine d’errance.

e Monde.fr avec AFP | • Mis à jour le

Etant donné comment le nouveau gouvernement italien a traité des migrants (plus de 600 ) secourus en mer par des ONG formées de bénévoles qui se dévouent sans relâche afin de sauver ces femmes, ces hommes,  ces enfants fuyant leurs pays où ils risquent leurs vies, je me permets de rappeler à mon très, très petit niveau, que l'Italie a été une terre d'émigration. Et que les émigrés italiens, surtout aux Etats-Unis où ils étaient désinfectés à coups de lance à eau avec un produit insecticide dès leur descente du bateau, ont été tout aussi mal traités que les Européens traitent les réfugiés…. sauf dans les Pyrénées...

 

Mes grands-parents sont arrivés d'Italie au début du 20ème siècle tout comme les familles dont on lit les noms sur les tombes du cimetière de Mauléon-Barousse. Mais à la différence de ces caricatures de personnages fermant les ports à des personnes qui ont tout bravé : la faim, la torture, l'esclavage, les coups, la peur, en France à cette époque, et bien, un tout petit païs, tout petit, les a reçus à bras ouverts...

 

Je vous raconterai un jour comment les réfugiés espagnols de la guerre civile en 1939, ont été accueillis et aidés après avoir franchi les ports au-dessus de Luchon et de Saint-Béat dans un état abominable, en plein mois de janvier et de février alors que la neige était haute et le froid glacial.

 

Comment ils ont été sauvés ... et, d'accord, entassés dans des wagons sans chauffage vers des camps non pas de concentration mais presque ... ! Comme ces trains étaient des omnibus, qui croyez-vous qui les attendaient à chaque halte, des paniers remplis de victuailles dans les mains et des colis de vêtements propres, repassés, des médicaments de base et des pansements … pour qu'ils puissent recouvrer un peu de dignité ? Eux aussi fuyaient une guerre impitoyable...

 

Leçon d'histoire et merci aux Espagnols, autre peuple d'émigration, d'avoir su tendre des bras aussi grands ouverts !

Alors voici à nouveau les récits faits par ma maman qui est née en France et qui a su l'aimer, elle au moins… parce que lorsque l'on rejette son frère Vivant - de quelque pays et d'origine qu'il soit - on n'aime personne, on n'aime pas son pays ...

 

 

Le col de l'Aouet en Barousse ; Vautours fauves : écureuil ; renard. Ce ne sont pas eux les immigrés bien sûr.....Le col de l'Aouet en Barousse ; Vautours fauves : écureuil ; renard. Ce ne sont pas eux les immigrés bien sûr.....
Le col de l'Aouet en Barousse ; Vautours fauves : écureuil ; renard. Ce ne sont pas eux les immigrés bien sûr.....Le col de l'Aouet en Barousse ; Vautours fauves : écureuil ; renard. Ce ne sont pas eux les immigrés bien sûr.....

Le col de l'Aouet en Barousse ; Vautours fauves : écureuil ; renard. Ce ne sont pas eux les immigrés bien sûr.....

En mettant un peu d'ordre - si l'on peut dire vu le bazar que je peux provoquer en quelques minutes ! - dans les dossiers de la Gazette des Vallées que nous avions fondé en 1996 avec un groupe de passionnés de la culture paysanne, j'ai retrouvé les récits de ma mère Joséphine sur sa vie de fille d'immigrés à Mauléon-Barousse, village qu'elle a toujours aimé profondément car elle y avait toutes ses attaches, toutes ses amies, tous ses amis d'enfance et de jeunesse, toute sa famille, tous ses souvenirs...

 

Alors commençons aujourd'hui à les connaître....

 

Gazette des Vallées n°4 mai 1998.

 

" Toutes les familles italiennes de Mauléon-Barousse travaillaient pour le compte de Gustavo Arcangéli qui avait créé une entreprise de fabrication de charbon de bois et de traverses de chemin de fer sur le site de la Christinie à Mauléon.

De tout temps, il y avait eu des moulins et des scieries dans ce village et la Christinie, disent les historiens locaux, était exploitée au Moyen-Age et plus tard par les Cagots.

Gustavo Arcangéli était arrivé comme mon père et les autres charbonniers en Barousse au début du siècle, fabriquer du charbon de bois. Mais lui, il s'était installé avec sa famille à Ferrère avant de descendre à Mauléon. Il a embauché tous ses compatriotes, certains restaient à la scierie pour travailler le bois en traverses. Elles étaient transportées à la gare de Saléchan où les ouvriers les entassaient dans les wagons. Elles étaient très lourdes et ils en avaient les épaules lacérées, ça saignait beaucoup. Alors, ma mère, pour les soulager, leur avait cousu des coussinets et ils allèrent bien mieux après.

 

Gustavo Arcangéli avait acheté des coupes de bois à Mouscaro dans la forêt domaniale de Ferrère et pour y accéder, il avait élargi le sentier et en avait fait une piste empierrée qui devint la route que l'on connaît aujourd'hui. Comme les parcelles étaient très éloignées, il monta là-haut un village en bois. Il y avait une cantine et 50 ouvriers y vivèrent, hors hiver, durant deux ans. Les camions descendaient les roules même le dimanche matin, ce qui choquait profondément le curé de Mauléon qui en faisait la remarque dans chacun des ses sermons. Ceci se passait dans les années 20-30 et ce petit village de cabanes en bois était superbe.

 

Au début donc, il y avait les ouvriers à l'usine et les charbonniers dans les bois de Ferrère, du Hourmigué et du Monsacon. Ils montaient le matin et redescendaient le soir retrouver leurs familles au village. Il n'y avait que nous qui vivions dans les bois dans la cabane que mon père avait construite, de la fin mars jusqu'à la première neige. Il me fallait une heure pour descendre à l'école le matin et une autre heure pour remonter le soir. Je vous raconterai tout cela une autre fois car je vois dans vos yeux des interrogations. Et oui ! vivre les premières années de sa vie au rythme de la nature laisse des souvenirs très forts !

 

J'ai appris un certain art de vivre. Je me souviens des couleurs des saisons qui paraissent semblables mais qui sont différentes parce que la Nature se renouvelle sans cesse, même si nous avec nos yeux humains, nous ne le voyons pas.

 

Je me souviens encore des chants d'oiseaux qui se levaient en même temps que nous ou plutôt nous nous levions en même temps qu'eux !  lorsque le jour pointait son nez. Je vois encore les vautours fauves s'acharner sur une carcasse de brebis dans le Hourmigué. Je vois encore les écureuils sauter dans les arbres autour de la cabane et les renards qui passaient sans crainte d'être dérangés. Je sens encore le parfum des fleurs des montagnes, de l'herbe, de la terre fouillée par les sangliers. J'entends encore le murmure des sources et des ruisseaux qui berçaient nos rêves et les faisaient plus beaux".

 

 

Gazette n°5 juin 1998

 

"Mon père avait l'autorisation de porter un fusil pour tuer le gibier afin d'améliorer notre ordinaire mais il n'aimait pas tuer. Mes frères, d'ailleurs, non plus. Ils détestaient les armes à feu.

Une année, mon frère aîné Joseph dit Pépé (prononcer peipé), eut un accident avec la sienne. Ce devait être en 1924, il venait de rentrer d'Italie où il avait effectué son service militaire à Gênes durant les 18 mois obligatoires. Comme tous les soldats des garnisons italiennes de la classe 1921 (né en 1901), il avait participé à la défense de la capitale contre la Marche sur Rome du 27 au 30 octobre 1922. L'écrivain Gabriele d'Annunzio avait eu l'idée d'appeler les "Chemises Noires" c'est-à-dire les hommes de Mussolini et de les faire marcher sur Rome pour contraindre le roi Victor-Emmanuel III à demander à ce dernier de former le gouvernement. Le roi avait, quant à lui, appelé ses soldats à empêcher toute tentative de coup d'Etat mais il dût finalement céder et on sait ce qu'il advint de l'Italie, hélas...

 

Mon frère, qui ne pouvait montrer ses convictions politiques, avait gardé de cet épisode un souvenir amer car il pensait que Mussolini déshonorait l'Italie...

 

Pépé était donc revenu à Mauléon et était monté avec nous en forêt dans le Hourmigué de Cazarilh. Tout en haut, évidemment et mon père avait encore construit une cabane. Ce jour-là donc, il nettoyait son fusil et machinalement le posa sur sa cuisse droite, le canon appuyé sur son pied gauche. Il fit tomber quelque chose par mégarde et en se baissant pour le ramasser, le coup partit. Il portait des brodequins épais mais la balle lui transperça le pied, lui sectionnant deux doigts.

 

J'avais huit ans et je me souviens encore de la scène. Ma mère lui entortilla le pied avec tous les chiffons qu'elle put trouver et en particulier avec des chaussettes car le sang coulait abondamment. Puis mon père le chargea sur son dos et le descendit à Cazarilh.

Là au village, il rencontra un agriculteur, Monsieur Comet qui attela tout aussitôt ses vaches à son tombereau pour transporter mon frère jusqu'à Mauléon.

 

A cette époque, nous habitions -  l'automne et l'hiver - en Sourtaou et la distance était trop grande pour le porter à bras. Il était très grand et très mince mais il pesait son comptant de muscles. Tout le monde était redescendu et ma mère essayait toujours par tous les moyens d'arrêter le sang de couler. A peine arrivés à la maison, mon père alla chercher Madame Sandra, la propriétaire de l'Hôtel des Pyrénées qui avait été infirmière durant toute la guerre de 14-18 et ce, sur tous les fronts, pour soigner mon frère.

 

Elle arriva immédiatement avec des pansements et de l'eau oxygénée mais le sang coulait toujours. Alors, quelqu'un appela le docteur Trey qui avait son cabinet à l'Hôtel de France à Loures. Il monta aussitôt et prodigua à Pépé les soins nécessaires mais il ne put sauver les doigts. Ils ne tenaient presque plus alors, il les sectionna juste à la phalange mais en travers vers l'extérieur... sans aucune anesthésie ! Madame Sandra vint lui changer les pansements tous les deux jours.

 

Pépé ne s'était pas plaint une seule fois et ne dit rien car il se sentait en faute ! Je me souviendrai toujours du "savon" que mon père lui passa ! Qu'est-ce qu'il était en colère ! Mon frère ne lui répondit pas une seule fois et pourtant il avait 23 ans ! Mais on ne répondait pas aux parents à cette époque-là....

 

Revenons à la forêt.

 

Oui, mon père avait le droit de chasser mais il disait qu'il fallait respecter la vie parce que nous étions vivants comme les animaux, comme les plantes et les arbres.

 

Je me rappelle de mon père comme d'un "grand monsieur" parce qu'il avait beaucoup de respect pour tout. Il ne parlait que pour l'essentiel et il nous recommandait de ne pas importuner les autres parce que (et surtout) nous n'étions pas dans notre pays. Nous ne devions pas donner notre avis ni nous mêler des conversations des français : il fallait être toujours poli. Ma mère était d'accord avec lui sur tout cela mais elle avait décidé que du moment que nous étions en France, nous devions vivre et surtout nous nourrir comme les français.

 

Bien sûr nous mangions la pastachuta, la pollënta, le minestrone, les gnocchis mais elle achetait des produits français. Par exemple, elle utilisait le fromage de Barousse pour la pastachuta. Elle le faisait sécher tout en le lavant souvent à l'eau tiède, puis elle le frottait avec un petit peu d'eau-de-vie. Quand il était dur comme de la pierre, elle le râpait. Je garde encore en bouche le souvenir de la "pasta" à la baroussaise tellement elle était bonne, bien meilleure qu'avec du parseman ! Il n'y a pas meilleur fromage que celui de Barousse !

 

C'est à Saint-Bertrand que ma mère a mangé du pain blanc pour la première fois et qu'elle a jeté aux orties et dans les oubliettes du souvenir le pain à la farine de châtaignes que l'on mangeait là-bas, en Italie, à Maresca plus précisément....

Mes parents Laurent et Catherine Cinotti, mes frères Joseph, Guido, René, mes sœurs Eléonore et Fernande se sont vite intégrés à la Barousse car la région de Pistoia en Toscane ressemble beaucoup à la vallée : même type de montagnes, de paysages, de villages, de gens....

 

Et surtout, surtout parce que les habitants étaient accueillants et fraternels.

Ma mère m'a toujours dit que s'il n'y avait pas eu une langue différente, elle aurait toujours cru être dans son pays et y tenait".

 

Comme quoi le racisme et la haine des autres n'existent que parce que des "givrés" en font leur fond de commerce....

 

Jackie Mansas

30 avril 2017

 

http://www.pyrenees-evasion.com/julien-gomis/accompagnateur-en-montagne/randonnee-en-montagne/barousse-col-d-aouet-mail-d-areng-mont-ne.html

http://ikonal.com/photos-ecureuils

http://oiseaux-net.

Et images Google.

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J
Ai trouvé un excellent article/étude de @bernard jomard sur les évolutions démographiques ,le vieillissement, les migrations et réfugiés , à lire sur : http://bernard-jomard.com/2016/03/09/refugies-migrants-regardons-la-verite-en-face/
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